Paris, 3h30, une nuit de février. Anna*, étudiante étrangère de 29 ans, est victime d'un viol à quelques mètres de son appartement. Les policiers, rapidement prévenus, font grimper la jeune femme en état de choc dans leur fourgon, direction le commissariat. Sur place, ce n'est pas tant le fait d'enchaner les dépositions, pendant quatre heures, dans ses vêtements trempés et encore souillés de sperme, qui la déstabilise. Ce n'est pas non plus le fait de rester assise, le pantalon béant, avec pour seule consigne de ne "surtout pas remettre sa ceinture, pour les empreintes". Non, ce qui choque Anna, c'est bien l'indifférence générale dans laquelle se déroulent ses interrogatoires successifs.
Une semaine après le drame, elle raconte à metronews : "Au commissariat, j'ai été prise en charge par deux policiers, alors que j'aurais largement préféré me confier à une femme. Ils s'énervaient parce Air Max 90 que l'amie anglaise qui m'accompagnait pour faire la traduction ne parlait pas assez bien franais à leur got. Je me suis sentie jugée. On m'a demandé si j'avais bu et comment j'étais habillée au moment du viol. Comme si a pouvait expliquer quoi que ce soit…" Elle poursuit, davantage consternée qu'en colère : "Ils ne semblaient pas intéressés et ne montraient aucune émotion… peut-être parce qu'ils voient des cas comme le mien tous les jours En fait, après toutes ces questions, il n'en manquait qu'une seule, celle qui fait la différence : un simple 'a va aller ' En face de moi, a aurait pu tout aussi bien être des robots. Où est l'humanité "
Mur d'indifférence
Ce mur d'indifférence, Anna n'est pas la seule à le décrire. Pour en savoir davantage sur la prise TN Requin en charge des victimes de viol ou d'agressions sexuelles par la police, metronews a recueilli le témoignage de plusieurs plaignants. A chaque fois, revient le constat amer d'un manque criant d'humanité. Céline, jeune femme originaire du Doubs, nous raconte comment elle a décidé, adolescente, de sortir du silence. Abusée sexuellement par son beau-père pendant des années, elle réalise soudain que ce qu'elle a vécu "n'est pas normal". "C'est ma psy qui a fait le signalement. Le rendez-vous avec la police s'est déroulé à l'hpital, pendant que j'étais prise en charge pour les constatations" détaille-t-elle. "C'était très difficile. L'attitude des gendarmes – une femme et deux hommes - était très froide, ils ne compatissaient pas. J'avais l'impression d'être jugée, d'être la coupable. Je pleurais beaucoup mais en face de moi, on restait glacial. Dans la chambre, il y avait trop de monde, je n'ai pas réussi à finir la déposition du premier coup."
Une absence d'empathie également remarquée par Thomas*, séquestré et violé par un homme à l'adolescence, alors qu'il se trouve en état de coma éthylique. Quinze ans plus tard, à l'ge de 30 ans, celui qui préfère témoigner par mail plutt que par téléphone car aux yeux de sa femme, il "porte le masque du mec qui va bien", décide de porter plainte. "Une association d'aide aux victimes m'a redirigé vers un commissariat. Je m'y suis rendu apeuré. La policière qui m'a reu – je ne voulais surtout pas parler à un homme – était très à l'aise, absolument pas dans la compassion. Pire, la seconde fonctionnaire de police à qui j'ai d raconter mon histoire m'a carrément pris de haut. J'étais sans voix, c'était le cliché du mauvais flic."
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"Nous ne sommes pas formés"
Et du cté des policiers, qu'en dit-on Pour le savoir, nous avons contacté la commissaire du 11eme arrondissement, cheffe du service d'accompagnement et d'investigation de proximité (SAIP). Nike TN Elle reconnat d'emblée qu'aucune formation spécifique à l'accueil des victimes de viol ou d'agression sexuelle ne leur est imposée : "Nos services interviennent en premier sur le terrain dans le cas d'une agression sur la voie publique, mais il est vrai que nous ne sommes pas formés à la prise en charge de ces victimes." A tout le moins existe-t-il une marche à suivre : "On essaie de prendre en charge ces personnes le plus rapidement possible, dans un endroit confidentiel et pas dans des bureaux communs. On tente aussi de confier la déposition à un fonctionnaire expérimenté. En ce qui concerne la visite chez le médecin, tout dépend du type d'agression. Si elle vient de se produire, nous conduisons directement la victime aux UMJ (unités médico judiciaires, ndlr). En revanche, si les actes sont antérieurs, on préfère donner un rendez-vous à la victime. Elle s'y rendra plus tard. En fait, il n'y a pas vraiment de protocole, mais plutt un ensemble de bonnes conduites."
De protocole, pourtant, il est question dès novembre 2014 parmi les équipes de Marisol Touraine, ministre de la Santé. Ambitieux projet "d'amélioration de la prévention et de la prise en charge des femmes victimes de violences"… il accouche d'une souris, en recommandant par exemple une "unité de lieu". En clair, le texte encourage une intervention coordonnée entre policiers et médecins, afin d'éviter que les victimes ne soient livrées à elles-mêmes, et ne décident finalement d'abandonner les poursuites.
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